jeudi 12 mars 2015

Dragana Simic Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale

 Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).
Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.


La vidéo du lancement de SPACE X.

Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.

Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »


 SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA


Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.



Propulsion de la fusée Space X


Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.

Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.

« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque chose.


 DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS



« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »


La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du monde, fanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à
Dessin d'enfant d'une fusée

sortir du marché. »


Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « d'hier soir le Le tir avorté montre », apprécie M. Israël.

Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.


ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE



Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.

De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.

Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – le Centre national d'études spatiales (CNES) et le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.

 « LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »


Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).

A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »

Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure Lo

Camille Prioul Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale

Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).

Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.



Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.

Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »

SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA

Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.



Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.

Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.

« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque chose.

DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS


« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »



La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du monde, fanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à sortir du marché. »

Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « Le tir avorté d'hier soir le montre », apprécie M. Israël.

Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.

ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE


Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.

De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.

Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – le Centre national d'études spatiales (CNES) et le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.

« LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »


Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).

A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »

Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure Los Angeles à San Francisco grâce à Hyperloop, un tube qui propulse dans un tunnel le passager mis en capsule à une vitesse supersonique. Une manière d'entretenir le rêve, le temps que les premiers projets aboutissent.


mercredi 11 mars 2015

Elisabeth Tubiana Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale

Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale



Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).

Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.



Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.
Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »

SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA

Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.

Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.
Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.
« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque chose.

DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS

« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »
La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du mondefanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à sortir du marché. »
Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « Le tir avorté d'hier soir le montre »apprécie M. Israël.
Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.

ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE

Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.
De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.
Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – le Centre national d'études spatiales (CNES) et le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.

« LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »

Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).
A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »
Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure Los Angeles à San Francisco grâce à Hyperloop, un tube qui propulse dans un tunnel le passager mis en capsule à une vitesse supersonique. Une manière d'entretenir le rêve, le temps que les premiers projets aboutissent.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/11/26/elon-musk-le-trublion-de-l-aventure-spatiale_3520367_3234.html#HUCYHLwgU2Y4i6bK.99

Kiki Alouest : Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale



Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).
Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.






Andrea Miszovits -  Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale





Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).

Emma BEHIRIE lon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spa



Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).
Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.


Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.

Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »

 SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA


Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.


Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.

Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.

« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque  DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS

« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »

[

La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du monde, fanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à sortir du marché. »

Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « Le tir avorté d'hier soir le montre », apprécie M. Israël.

Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.

 ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE


Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.

De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.

Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – http://www.arianespace.com/about-us/Stephane-Israel-bio-Jan2014-FR.pdfet le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.

« LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »


Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).

A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »

Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure Los Angeles à San Francisco grâce à Hyperloop, un tube qui propulse dans un tunnel le passager mis en capsule à une vitesse supersonique. Une manière d'entretenir le rêve, le temps que les premiers projets aboutissent.

lleguet Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale



Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).

Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.




Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.

Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »


 SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA


Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.




Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.

Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.

« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque chose.


 DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS


« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »


La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du monde, fanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à sortir du marché. »

Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « Le tir avorté d'hier soir le montre », apprécie M. Israël.

Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.


 ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE



Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.

De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.

Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – le Centre national d'études spatiales (CNES) et le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.


 « LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »



Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).

A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »

Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure L

Mihaela GHEORGHISOR "La NSA"

La NSA surveillerait 1,6% du trafic Internet de la planète



L'Administration Obama a transmis ce chiffre aux Européens, à l'issue d'une enquête approfondie. Bruxelles menace les États-Unis de suspendre un accord qui permet aux entreprises américaines de transférer des données entre les deux continents.

À Bruxelles.

La NSA et les «grandes oreilles» américaines écument 1,6% du trafic Internet de la planète, mais n'en retiennent que 0,004% pour une enquête approfondie, d'après des chiffres que l'Administration Obama vient de transmettre aux responsables européens après les révélations du lanceur d'alerte américain Edward Snowden.

La fuite, inédite et peut-être calculée, a précédé de moins de vingt-quatre heures l'annonce de nouvelles exigences de l'Europe sur la protection des données individuelles, pour l'essentiel stockées sur des serveurs américains. La commissaire Viviane Reding veut obtenir de Washington, d'ici à l'été 2014, que les ressortissants européens puissent obtenir réparation devant la justice américaine de tout usage abusif de leurs informations personnelles. Les États-Unis ont jusqu'ici refusé de se plier à la demande, qui nécessiterait le vote d'une loi par le Congrès.


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Pour l'obtenir, la Commission au grand complet doit trancher mercredi sur le recours à «l'épée de Damoclès» que Viviane Reding garde en réserve: la possibilité pour l'UE de suspendre l'accord dit «Safe Harbour». Il s'agit d'un ensemble de règles de transparence et de confidentialité auxquelles doivent souscrire des entreprises américaines comme Google, Facebook ou Amazon afin de pouvoir transférer physiquement les données de l'Europe vers les États-Unis.

Une arme atomique


Mais révoquer cette homologation, comme l'a demandé le Parlement européen après l'affaire Prism, serait l'équivalent de l'arme atomique. La sanction reviendrait à compartimenter la Toile, en forçant les géants du Net ou de grands noms de la banque comme MasterCard à isoler leurs opérations en Europe. Elle pénaliserait de même la plupart des grandes entreprises du Vieux Continent qui, tel le français Orange, stockent en masse leurs données sur le territoire américain.

Les statistiques d'«écoute» transmises à Bruxelles par les services américains du renseignement tombent à point nommé, mais laissent les experts européens perplexes. La proportion de 0,004% paraît a priori minime. Elle représente pourtant une masse d'informations époustouflante, quand on la rapporte à un trafic numérique que continuent de faire exploser la vidéo et le streaming.

Possot Nina Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale



Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).
Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.


Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.

Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »

 SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA


Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.


Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.

Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.

« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque chose.

 DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS


« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »



La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du monde, fanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à sortir du marché. »

Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « Le tir avorté d'hier soir le montre », apprécie M. Israël.

Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.

ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE


Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.

De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.

Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – le Centre national d'études spatiales (CNES) et le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.


« LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »


Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).

A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »

Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure Los Angeles à San Francisco grâce à Hyperloop, un tube qui propulse dans un tunnel le passager mis en capsule à une vitesse supersonique. Une manière d'entretenir le rêve, le temps que les premiers projets aboutissent.

hanane benali




Elon Musk, cet entrepreneur qui s'invite dans l’aventure spatiale




Coup de tonnerre dans le spatial. A 42 ans, Elon Musk a réussi son pari de mettre en orbite un satellite de communication à 36 000 kilomètres de la terre à partir de Cap Canaveral (Floride).

Prévu lundi 25 novembre, le lancement de sa fusée Falcon 9 a été reporté plusieurs fois, le temps de résoudre un problème de pression dans un réservoir d'oxygène liquide. Nous voulons « être super prudents », a affirmé M. Musk. Finalement, sa société Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX) a lancé son premier satellite avec succès mardi 3 décembre dans la soirée.

[Retrouver la vidéo du lancement de SpaceX sur Youtube et l'ajouter ici]

Rien ne prédisposait cet Américano-Sud-Africain qui a fait fortune en développant le système de paiement Paypal et dont les voitures électriques de luxe Tesla sont aujourd'hui très prisées des milliardaires américains à arriver dans le secteur du spatial. Avec l'entreprise SpaceX, il entend pourtant exister face aux deux grands des lanceurs – l'européen Arianespace et le russe ILS avec sa fusée Proton – et rebattre les cartes d'une filière dominée par Ariane.

Lorsqu'il commence cette aventure, en 2002, M. Musk suscite scepticisme, voire défiance. Car tout néophyte qu'il est, ce trentenaire à l'époque n'en est pas moins arrogant. Dans ce milieu plutôt discret et polissé, où le « nous » est préféré au « je », ses déclarations du début prêtent à sourire. Surtout quand il explique aux experts qu'il va leur apprendre à construire des fusées pas chères. Balayant les conventions, certaines de ses formules irritent particulièrement. Comme celle qu'il fait, après le tir réussi de 2010 : « Ce 4 juin est connu deux fois dans le spatial, comme celui d'un échec pour Ariane 5 en 1996 et comme celui d'un succès pour nous, aujourd'hui. »


 SOUTIEN DE L'US AIR FORCE PUIS DE LA NASA


Petit à petit, l'entreprise californienne gagne en crédibilité, forte du soutien de l'US Air Force puis de la NASA. L'armée lui signe en 2005 un contrat de 100 millions de dollars pour lancer des petits satellites rapidement. Trois ans plus tard, en 2008, la NASA lui accorde 1,6 milliard de dollars pour 12 missions de ravitaillement de la Station spatiale internationale avec son vaisseau-cargo Dragon. Deux d'entre elles ont déjà été réalisées avec succès.

Jusqu'ici, les tirs ont concerné les orbites basses, entre 500 et 800 kilomètres de la Terre. Jamais SpaceX ne s'était attaqué au marché commercial des satellites de communication en orbite géostationnaire. Un marché très concurrentiel d'une vingtaine de satellites à lancer par an.

Et c'est le numéro deux du secteur, l'opérateur luxembourgeois SES, qui a décidé d'être le premier à faire confiance à cette nouvelle fusée américaine en lui confiant la mise sur orbite d'un de ses satellites. « Nous connaissons très bien SpaceX et savons exactement ce qu'ils font, ayant des ingénieurs sur place », explique l'un des porte-parole de SES, Markus Payer. 
M. Musk n'est pas seulement un patron, poursuit-il, il est aussi « chief designer » et suit donc les travaux dans le détail, très impliqué dans tout ce qui est technologie.

« Ce n'est pas une première, nous avons aussi été pionniers avec la fusée Proton », ajoute-t-il pour relativiser la prise de risque. Quant au report du lancement, cela ne  l'inquiétait pas : « Cela arrive souvent, mais qu'est-ce que quelques jours de report pour un satellite qui va fonctionner quinze ans. » Pourtant, un échec restait possible : l'opérateur Intelsat – qui a été le premier client de la fusée chinoise Long March, dont le vol en 1996 fut un fiasco – en sait quelque chose.


 DES TARIFS TRÈS COMPÉTITFS


« Encourager l'arrivée d'un nouvel entrant pour un opérateur de satellites, c'est s'assurer de la diversité de ses lancements, souligne Rachel Villain, directrice espace de la société d'études Euroconsult, le pire pour eux étant de dépendre d'un seul système. » Pour l'heure, le monde des lanceurs est un duopole, « presque un monopole » selon cette experte : « Les problèmes réguliers de Proton font qu'Ariane est le seul véhicule à la fiabilité totale. »


La compétition commence par des tarifs très bas. Ce lancement a été proposé à 55 millions de dollars (40,5 millions d'euros) comparé aux 80 millions de dollars au minimum qu'auraient pu facturer les Européens pour ce type de petits satellites. « Nos prix sont les plus compétitifs du monde, fanfaronne M. Musk en évoquant le lancement. Nous allons contraindre toutes les autres sociétés soit à développer de nouvelles technologies, soit à sortir du marché. »

Si le danger de perdre des contrats est réel, pas question de « perdre son sang-froid », temporise Stéphane Israël, PDG d'Arianespace. « SpaceX n'est pas comme un champignon d'automne arrivant subitement. Cela fait trois ans que nous assistons à sa montée en puissance. » Le lanceur européen a pour lui sa fiabilité, avec plus de 50 tirs successifs réussis et un carnet de commandes record. Il faudra beaucoup de temps à SpaceX pour offrir cette même sécurité et le niveau de disponibilité atteint par Ariane. « Le tir avorté d'hier soir le montre », apprécie M. Israël.

Cependant, reconnaît-il, « il faut réagir. Notre fiabilité record justifie un écart de prix comme d'ailleurs avec le Proton, mais nous devons envisager une baisse maîtrisée de nos tarifs sur les petits satellites si la concurrence s'accroît. Cet effort devra passer par une réduction des coûts de la filière Ariane ». A terme, selon le patron d'Arianespace, les prix devraient se rapprocher, la firme américaine ne pourra maintenir ses tarifs d'appels et devra les relever.


 ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE


Face au Falcon 9 de SpaceX, Ariane 5 est non seulement pénalisée par la force de l'euro, mais aussi par sa configuration technique et industrielle. Le lanceur européen est conçu pour emporter deux satellites à la fois, un gros et un petit. Il lui faut donc gérer l'arrivée simultanée de deux charges venant d'opérateurs différents. Et ce n'est pas toujours évident. Ainsi, le tir du 6 décembre vient d'être reporté car l'un des deux satellites n'est pas prêt.

De plus, l'évolution technologique avec la montée en puissance de la propulsion électrique pousse à la réalisation de satellites plus petits et plus légers. Dans ce contexte, il est moins nécessaire d'avoir une fusée capable de transporter de lourdes charges et la stratégie de SpaceX s'en trouve confortée.

Voilà pourquoi les Européens ont décidé il y a un an de concevoir une nouvelle fusée, Ariane 6, qui transportera un seul satellite, et de revoir la filière industrielle pour abaisser les coûts. En attendant ce lanceur qui ne sera pas livré avant 2020, une version modifiée d'Ariane 5 devra faire l'affaire. Mais, avec le déploiement de SpaceX, les Français – le Centre national d'études spatiales (CNES) et le ministère de la recherche – ont demandé aux Européens d'accélérer le nouveau programme.


 « LE DON DE TRÈS BIEN UTILISER LES FONDS PUBLICS »


Car l'entreprise de M. Musk impressionne. En quelques mois, SpaceX a en effet revu et adapté son lanceur avec des moteurs plus puissants que dans les versions antérieures, des réservoirs de carburant plus grands ainsi qu'une nouvelle électronique de bord. La société est même capable d'organiser deux lancements en l'espace de deux mois – en septembre, elle a mis sur orbite un satellite scientifique pour le gouvernement canadien – sur des pas de tirs différents, et de corriger entre-temps les anomalies découvertes (en l'occurrence l'oxygène liquide gelait).

A la différence des Européens, l'entreprise américaine bénéficie d'un soutien public massif notamment de la NASA. « Tout entrepreneur visionnaire qu'il soit, Elon Musk a un don particulier, celui de très bien utiliser les fonds publics, juge un analyste financier. Les trois secteurs dans lesquels il se développe – la voiture électrique, le photovoltaïque et l'espace – reçoivent d'énormes subsides. »

Ce visionnaire n'entend pas s'arrêter là et parle déjà d'emmener des passagers vers Mars, ou de relier en une demi-heure Los Angeles à San Francisco grâce à Hyperloop, un tube qui propulse dans un tunnel le passager mis en capsule à une vitesse supersonique. Une manière d'entretenir le rêve, le temps que les premiers projets aboutissent.